Avec l'arrivée massive à l'âge de la retraite des patrons issus du baby-boom, la question de la reprise des entreprises franchisées devient vitale pour les réseaux. D'autant plus vitale que la crise n'épargne pas les trésoreries des franchisés mais aussi des repreneurs !
Dans un contrat de franchise, si l'accent est mis essentiellement sur l'accompagnement à la création, la question de la fin de contrat, à terme ou anticipée, est plus souvent laissée au bon vouloir des franchiseurs.
Ainsi, selon une étude réalisée par la Fédération française de la franchise, 75 % des franchisés pensent qu'ils seront accompagnés par leur enseigne au moment du passage de témoin de leur entreprise, mais la même étude estime que moins de 25 % des franchiseurs ont mis en place des dispositifs particuliers pour gérer la sortie de réseau de leur franchisé.
Ces deux chiffres démontrent plus qu'un long discours que la question de la sortie de réseau est loin d'être une priorité pour les franchiseurs... à tort ! En effet, dans un réseau, chaque entreprise franchisée est un maillon important de la chaine. En cas de départ en série, le maillage savamment tricoté depuis des années peut se retrouver mité. Une situation d'autant plus critique que la multifranchise se développe au point de concerner 21 % des franchisés en 2011...
Quelles solutions pour les franchiseurs ?
Si les réponses des franchiseurs face à la sortie de réseau sont largement en deçà des espérances des franchisés, certains réseaux ont toutefois fait l'effort de se structurer pour apporter des solutions aux franchisés sur le départ.
Que proposent-ils ? Essentiellement une mise en avant des entreprises à reprendre dans leurs supports de communication (plaquette, dossier de presse, site internet), relayée, le cas échéant sur le terrain lors des réunions de sélection. D'autres ont choisi d'aller plus loin en créant des systèmes de parrainage permettant notamment à un salarié d'une entreprise franchisée de pouvoir disposer d'une aide financière par exemple pour reprendre une entreprise franchisée voisine. La tendance actuelle va également vers la reprise du point de vente à céder par un franchisé du réseau qui devient du coup multi-franchisés.
En dernier recours, lorsque l'entreprise à céder est stratégique du fait de son emplacement, le réseau peut lui même décider de la racheter pour la gérer en mode succursale. Comme on le voit, toutes ces solutions peuvent être opérationnelles pour répondre aux départs programmés (départ en retraite, ou vente volontaire du fonds de commerce), mais à l'évidence, elles ne sont pas adaptées dans le cas où la sortie de réseau se fait sur un mode conflictuel. Dans ce cas précis, la plupart des réseaux n'ont rien prévu de particulier et se cantonnent à laisser le franchisé se débrouiller seul pour rechercher un repreneur par ses propres moyens.
Le cas particulier du départ d'un multi-franchisé
En novembre dernier, Jacques Boulay, directeur de recherche de l’Essca Ecole de Management, rendait publiques les conclusions d'une étude qu'il a conduit sur la multi-franchise pour le compte de la Fédération française de la franchise. Interrogé par le Nouvel Economiste en juin dernier, Jacques Boulay a apporté quelques éclairages intéressants sur le cas particulier de la sortie de réseau des multi-franchisés.
Selon lui, « la nécessité de penser cette question est grandissante, d’autant que certains réseaux atteignent 30 ou 40 ans et vont voir partir des franchisés qui, au cours de leurs carrières sous l’enseigne, ont développé plusieurs unités ». Le problème est d'autant plus complexe que la revente d'une mini-chaine constituée par un multi-franchisé est difficilement indivisible.
En effet, les entités travaillent le plus souvent de concert et font des économies d'échelle. Le morcellement est ainsi délicat. L'autre alternative pour le multi-franchisé est de vendre la totalité de sa mini-chaine à un repreneur unique. Ce dernier est de toute évidence un oiseau rare, car en effet, acheter plusieurs magasins demande des fonds importants. Pas simple. Selon les constations de Jacques Boulay, il semble bien que la première option, celle de la vente morcelée soit la plus fréquemment pratiquée. En effet, le chercheur et ses étudiants notent que la multi-franchise est marquée par un phénomène de vague.
Si globalement la multi-franchise concerne 21 % des franchisés, ce taux varie grandement selon l'âge du réseau. Ainsi, chez les jeunes réseaux de moins de 5 ans, le taux avoisinerait les 10 %, tandis que pour les réseaux plus âgés (entre 16 et 20 ans) il avoisine les 25 %, pour retomber ensuite à des niveaux très inférieurs. « Cette vague, partant d’une croissance de la multi-franchise au sein d’un réseau pour atteindre le phénomène inverse, peut s’expliquer par le cassage de mini-chaînes au sein d’un réseau ».
Dominique André-Chaigneau, Point Franchises©